Loi immigration : les digues républicaines ont cédé
Triste semaine pour l’humanisme, la fraternité et la solidarité. En quelques jours, au Parlement français, mais surtout à Matignon, en dehors du cadre régulier de la Commission Mixte Paritaire, ainsi que dans les institutions européennes ont été négociés des textes sur des politiques migratoires encore plus xénophobes.
Ce mardi 19 décembre 2023, les député·es de la Macronie et de la droite ont adopté grâce au soutien de l’extrême-droite, le projet de loi “Contrôler l’immigration, améliorer l’intégration” issu de la commission mixte paritaire, par 349 voix pour et 186 voix contre. Les Écologistes sont révoltés par cette alliance scélérate avec le Rassemblement national pour faire passer un texte xénophobe, aux antipodes des valeurs républicaines : la honte de la préférence nationale.
La préférence nationale dans l’attribution des aides sociales, les cautions demandées aux étudiant·e·s étranger·es, le retour du délit de séjour irrégulier, la facilitation des obligations de quitter le territoire français (OQTF) contre les personnes actuellement protégées (étrangers arrivés avant 13 ans, avec des liens familiaux en France ou présents depuis plus de 20 ans…), durcissement du regroupement familial et du droit du sol sans compter la promesse d’une réforme de l’aide médicale d’État (AME) à venir… le Rassemblement National ne cache pas sa joie de voir son programme appliqué dans le projet de loi voté mardi soir. Jamais un texte n’avait autant été plébiscité par les élu·es d’extrême-droite, qui y voient une “victoire idéologique” de leur camp. Jamais une loi sur une question de droits fondamentaux n’avait, du propre aveu du ministre de l’Intérieur, comporté autant de dispositions contraires à notre Constitution. Ce faisant, le gouvernement ajoute l’irresponsabilité à l’indignité.
En établissant de fait une préférence nationale dans des politiques publiques comme les aides sociales, l’enseignement supérieur, le gouvernement s’accommode de violation des droits fondamentaux dont notre République promet pourtant de garantir l’effectivité.
- Quelle logique applique-t-on, lorsqu’on supprime les tarifs sociaux dans les transports, dans un monde où la mobilité est une condition pour accéder à un emploi ?
- Quel rayonnement pour l’université quand, à l’heure d’accueillir des étudiant·es étranger·es, on fait payer une caution à un public déjà précaire et qui reste pourtant une richesse pour la France ?
- Ou est notre humanité lorsqu’on refuse l’hébergement d’urgence aux personnes sous OQTF ou lorsqu’on conditionne l’aide au logement à cinq ans de présence sur le territoire réduit à trente mois pour les étrangers qui travaillent, quand on connaît les difficultés pour obtenir un logement décent ?
À l’Europe aussi le refus d’accueillir les personnes en exil se fait de plus en plus manifeste : accélération des procédures de demandes d’asile qui est de fait un recul du droit, fichage des personnes arrivantes dès l’âge de 6 ans, possibilité de déroger au principe de solidarité entre Etat, criminalisation des ONG considérées hostiles aux Etats… L’Europe continue à se faire forteresse mortifère, alors que 30 000 personnes sont mortes en tentant de rejoindre le continent sur les 10 dernières années.
Aujourd’hui, la sidération et la colère dominent en voyant ici avec quelle facilité les élu·es de la majorité ont renié nos valeurs républicaines, là, en Europe, les mains tendues aux gouvernements de droite les plus dures.
Heureusement, les élans de solidarités existent et continueront à exister : des hébergements solidaires aux navires de sauvetage en mer, en passant par les collectifs citoyens qui se battent pour faire reconnaître les droits des jeunes exilé·es, nombre de nos concitoyen·nes démontrent quotidiennement leur solidarité et une volonté d’accueillir inconditionnellement les chercheur·ses de refuge.
Cette France humaniste trouvera toujours les Écologistes à ses côté pour lutter contre le populisme migratoire xénophobe des marchand es de haine.
Nous demandons solennellement au Président de la République de ne pas promulguer cette loi indigne de notre Nation.
Sophie Bussière & Aminata Niakaté, porte-parole nationales
La commission Immigration d’EELV