Mercosur : la Commission passe en force

La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a annoncé aujourd’hui, depuis Montevideo où se tient le sommet MERCOSUR, la conclusion de l’accord commercial avec les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay récemment rejoints par la Bolivie).

Cet accord d’association négocié depuis plus de deux décennies avait été mis en pause pendant la présidence de Bolsonaro.

Le groupe des Verts-ALE s’oppose à ce traité qui ne répond pas aux défis actuels que rencontrent l’Union européenne et les pays du Mercosur.

Suite à l’accord d’aujourd’hui, le traité devra recueillir l’approbation du Conseil à la majorité qualifiée des États membres* et celle du Parlement européen. L’intervention des 27 parlements nationaux est également nécessaire dans la mesure où il s’agit d’un accord mixte. Cependant, une manœuvre de scission du traité par la Commission, afin de court-circuiter la ratification par les parlements nationaux sur son volet commercial, ne peut être exclue à ce stade.

Déclaration de Saskia Bricmont, membre de la commission du commerce international en charge du dossier UE-Mercosur pour le groupe Verts-ALE :

« C’est au côté du président argentin d’extrême droite, Javier Milei, qu’Ursula von der Leyen a scellé l’accord UE-Mercosur qui ne répond ni aux besoins des Européennes et des Européens ni à ceux des citoyennes et des citoyens des pays du Mercosur.
Un passage en force**, qui, une fois de plus, profitera à une minorité d’acteurs issus de l’agro-business, des industries automobile et chimique.
Manifestement, les préoccupations exprimées par le monde agricole européen, la création d’emplois, la protection des droits sociaux, de la santé ou encore des forêts dans les pays du Mercosur ne sont pas prioritaires pour la présidente de la Commission européenne. Celle-ci semble avant tout s’intéresser aux débouchés potentiels pour des industries qui, pendant longtemps, ont préféré distribuer des dividendes plutôt que d’investir dans la transition écologique.

Le groupe Verts-ALE continuera à dénoncer ce traité de libre-échange incompatible avec les objectifs climatiques, le Pacte vert et un modèle de commerce et de développement durables.
Les politiques antisociales et climaticides de Javier Milei qui, cerise sur le gâteau, convoque un sommet réunissant l’extrême droite occidentale, indiquent qu’il ne sera pas un partenaire digne de confiance.

Nous rejetons cet accord qui renforcera le modèle agro-industriel au détriment de l’agriculture durable et des droits des peuples indigènes du Mercosur. Il ne permettra même pas de contrer l’influence croissante de la Chine dans les pays du Mercosur, d’autant que certains d’entre eux ont déjà noué des alliances (le Brésil via les BRICS) ou cherchent à négocier des partenariats avec elle. Cela nécessiterait une politique d’investissements massifs chez nos partenaires et non une augmentation des ventes de voitures, de produits chimiques et de services financiers. Or, le traité reste muet sur ce plan. Quant à la sécurisation des matières premières, l’Union européenne a, depuis 2023, un accord stratégique avec l’Argentine et en envisage un autre avec le Brésil, ce qui, à cet égard, rend l’accord inutile.

La Commission européenne, qui n’a pas hésité à s’affranchir de son devoir de transparence, veut avancer coûte que coûte et n’entend pas les préoccupations légitimes exprimées par de nombreux secteurs***, tout comme les scénarios alternatifs que nous avons proposés et qui s’articulent sur les conclusions du Sommet de juillet 2023 entre l’Union européenne et les pays d’Amérique latine et des Caraïbes. Nous continuerons, pour notre part, à défendre un rapprochement avec les pays sud-américains qui répondent à l’intérêt de tous et toutes aux côtés des consommatrices et des consommateurs, de la société civile et des syndicats européens et du Mercosur qui dénoncent également l’approche étroite et mercantiliste de l’accord. »

(*) La majorité qualifiée nécessite au moins 15 États membres tandis que la minorité de blocage requiert le vote de 4 États membres représentant au moins 35 % de la population de l’Union européenne. Les abstentionnistes qui expriment un ‘non poli’ compliquent la formation d’une majorité qualifiée (en particulier le critère démographique).

(**) Les dernières négociations se sont faites dans la plus grande opacité, nous avions écrit à la présidente de la Commission à ce sujet

(***) 400 organisations européennes et du Mercosur, fédérations et syndicats agricoles, syndicats de travailleurs, associations de consommateurs, ONG environnementales, représentants de populations autochtones.

En savoir plus :

Propositions alternatives de partenariats commerciaux (en anglais – avec un résumé de l’étude en français) :

Briefing

Campagne du groupe Verts-ALE sur le Mercosur

Étude

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