Nouvelles ressources propres européennes : un cadeau de Noël avant l’heure ?
Avec 6 mois de retard, la Commission européenne va enfin présenter sa proposition pour créer de nouvelles ressources propres pour l’Union européenne. Ces textes seront publiés le 22 décembre : un beau cadeau de Noël ? Pas tout à fait. Explications.
En décembre 2020, il y a donc un an tout juste, et après des jours d’âpres négociations, les États membres et le Parlement adoptaient un plan de relance européen pour lutter contre les conséquences du Covid 19. Celui-ci impliquait un emprunt commun (fait exceptionnel), et donc un remboursement commun. Pour ce faire, le Parlement a mis en avant une solution clef en main : créer de nouvelles ressources pour l’Union européenne.
C’est un combat mené de longue date par le Parlement européen et les défenseurs d’une Union forte et autonome. En effet, créer de nouvelles « ressources propres », comme on les appelle dans le jargon bruxellois, permet une triple prouesse :
- Cela renforce le budget de l’Union européenne.
- Cela renforce la démocratie européenne en limitant la dépendance vis à vis des États membres (qui sont aujourd’hui ceux qui alimentent à 75% le budget, avec les impôts payés par les ressortissants des différents pays).
- Mais surtout cela permettrait enfin d’assurer plus de justice fiscale en faisant payer ceux qui aujourd’hui échappent à l’impôt.
En effet, l’accord de décembre 2020 prévoyait la création d’un panier de ressources propres, dont une première partie serait présentée en juin 2021 (sic), et l’autre en 2024 qui concernent des secteurs et des acteurs qui ne contribuent pas à un juste niveau : les pollueurs et les riches. Nous aurons donc ce 22 décembre une proposition comprenant 3 nouvelles ressources propres : une partie du système de quotas carbone, une « taxe » carbone aux frontières (MACF) et le pilier 1 de l’accord de l’OCDE sur la fiscalité internationale des grandes entreprises.
Le problème majeur est le montant des fonds qui seront levés par ces taxes, et la portion qui sera attribuée au budget européen. La Commission ne souhaite toujours pas nous faire précisément part des montants envisagés – tout au plus avance-t-elle la somme de 15 milliards d’euros annuels, ce qui est dérisoire au vu des besoins. L’enjeu est bien de tout faire pour que le plan de relance ne soit pas payé par les contribuables, mais bien par celles et ceux qui aujourd’hui échappent à l’impôt : les pollueurs et les grandes multinationales du numérique en premier lieu. Pour cela, il faut donc revoir la copie des ressources propres, et changer de braquet. C’est possible.
Nous attendons de la Commission qu’elle propose au plus tôt une Taxe sur les transactions financières. Cette taxe est dans les cartons depuis des années, mais par manque de courage politique et par absence d’unanimité parmi les États membres, cette proposition est au point mort. Elle fait partie des pistes esquissées dans le panier de ressources propres, mais uniquement au conditionnel… Il est temps de réellement avancer sur ce dossier, cette TTF pouvant rapporter jusqu’à 57 milliards d’euros par an !
L’Union européenne se pare de beaux discours de « Pacte Vert » : qu’elle commence par assumer la nécessaire justice fiscale pour soulager les citoyennes et citoyens, et pour réellement donner à l’Union européenne les moyens de transformer radicalement ses politiques.