TAC et quotas 2022 : cette année encore, la surpêche continuera en Europe
En bref : À l’issue de deux jours de négociations, le Conseil des ministres européens de la pêche est parvenu à un accord sur les totaux admissibles de capture (TAC) et les quotas pour 2022. Lors de ces négociations, l’enjeu consistait à protéger nos océans en suivant les propositions de la Commission européenne, qui étaient basés sur les avis scientifiques.
Bien que l’objectif de l’année 2020 -consistant à exploiter tous les stocks à des niveaux durables- ne soit toujours pas atteint, les ministres européens chargés de la pêche ont choisi de continuer dans la voix de la surexploitation pour environ 35% des stocks sous quotas. Pire encore, en Méditerranée, où on estime que plus de 80% des stocks sont surexploités, la France et l’Espagne ont fait pression pour ne pas suivre les recommandations des scientifiques et les propositions de la Commission.
Des négociations toujours laborieuses avec le Royaume Uni, au détriment de la santé de nos océans et de nos pêcheurs
Concernant les stocks partagés avec le Royaume-Uni, aucun accord n’a pu être trouvé, ce qui imposera, comme au début 2021, de démarrer l’année avec un régime provisoire basé sur l’octroi de 25 % des préconisations scientifiques de l’année pour le premier trimestre 2022. Ce type de mécanisme ne permet pas d’assurer une gestion des pêches sur le long terme éclairée par les avis scientifiques. Et pour cause, deux stocks clés continueront d’être surexploités en 2022. Les ministres ont décidé de ne pas suivre la préconisation de réduction du TAC de 3.2% pour le cabillaud. Pour la plie, la réduction du TAC s’est établie à -12.3% par rapport à 2021, alors que les scientifiques préconisaient -15.1%.
35% des populations de poissons sous quota continueront d’être surexploités en 2022
Pour les populations de poissons gérées par l’UE uniquement, 35% des populations sous quotas continueront d’être surexploités en 2022, à l’instar des merlus de l’Atlantique Sud ou bien des soles des eaux ibériques. Une des rares bonnes nouvelles pour nos océans concerne les soles du golfe de Gascogne, pour lesquels les ministres s’en sont tenus à l’application du plan de gestion de 2019 pour les stocks de sole qui sont en mauvais état, en diminuant les quotas de 36%.
Malgré l’urgence en Méditerranée, la France et l’Espagne entraînent l’Europe dans la voie de la surexploitation
En revanche, en Méditerranée, où la situation est particulièrement préoccupante, la commission proposait d’appliquer le plan de gestion européen pour la Méditerranée occidentale, adopté en 2019, et qui vise à préserver les ressources halieutiques en réduisant le nombre de jours en mer des chalutiers. La France est concernée pour ses pêcheries chalutières exploitant le merlu et le rouget de vase. Ainsi, la Commission proposait d’octroyer 167 jours de pêche par chalutier dès 2022. Sous la pression de la France et de l’Espagne, les ministres n’ont fait que la moitié du chemin, en fixant le nombre de jours de pêche à 174 jours de pêche -contre 183 jours pour l’année 2021- au détriment de la bonne santé de nos stocks de poissons et de la rentabilité économique de nos pêcheries sur le long terme.
Lorsque les quotas diminuent pour protéger les populations de poissons, comme c’est le cas en Méditerranée et dans le Golfe de Gascogne, les pêcheurs impactés pourront bénéficier d’un plan d’accompagnement, financé par le fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMPA). Par ailleurs, dans le golfe de Gascogne où les régions impactés par le Brexit, le gouvernement pourrait utiliser les possibilités ouvertes par l’article 17 de la PCP pour répercuter cette baisse de manière différenciée entre les différents segments de la flotte, afin de protéger les pêcheurs artisans. Il s’y est pour l’instant toujours refusé.
Je me mobilise depuis le début de mon mandat en faveur de la préservation de la Mer Méditerranée, qui est la mer la plus surpêchée au monde. Dans le cadre de mon rapport “Plus de poissons dans les Mers” mais également dans le rapport récent sur la “reconstitution des stocks de poissons en Mer Méditerranée”, le Parlement européen rappelle clairement que toutes les populations de poissons devaient être exploitées à des niveaux durables en 2020, conformément à l’objectif de la Politique Commune de la Pêche. C’est encore loin d’être le cas. L’inaction des ministres européens, et le double discours de nombreux eurodéputé-e-s, ne font que retarder des mesures nécessaires car sans poissons, nous n’aurons plus de pêcheurs et pêcheuses.