Yémen: une violence sans fin, et le silence de la France
Les membres du Groupe d’expert.e.s éminent.e.s de l’ONU sur le Yémen ont aujourd’hui présenté leur troisième rapport à la Sous-commission droits humains du Parlement européen.
Mounir Satouri a saisi cette opportunité pour dénoncer les ventes d’armes de la France aux parties au conflit, poser la question de la régulation des formations des forces armées engagées sur le territoire européen dans le cadre de ces ventes et décrier le manque de moyens attribués par la communauté internationale à l’aide humanitaire dans un pays à feu et à sang.Lecteur vidéo00:0001:08
Une collecte de preuve par l’ONU nécessaire pour rendre justice
Le Groupe d’expert.e.s éminent.e.s de l’ONU sur le Yemen fait la lumière sur ce qui est sans doute l’atteinte humanitaire la plus grave et la plus honteuse de notre temps. Travaillant dans des conditions particulièrement difficiles cette année, ils et elles se sont vu une nouvelle fois refuser l’accès au territoire yéménite.
Brisant le silence, ses membres identifient les responsabilités étatiques et individuelles et contribuent ainsi à permettre qu’un jour, justice soit faite pour les crimes internationaux commis contre les Yéménites.
Afin de renforcer la collecte de preuves effectuée par les expert.e.s, plusieurs député.e.s européen.ne.s ont exprimé leur souhait de voir la création d‘un Mécanisme international, impartial et indépendant pour le Yémen tel qu’en a été établi un pour la Syrie. Cette création, dont l’Assemblée Générale de l’ONU – et non le Conseil de Sécurité – détient les clefs, pourrait être un pas concret vers la fin de l’impunité au Yémen.
Le silence de la France et des ventes d’armes qui nous font honte
Membre de la Sous-commission Sécurité et Défense de ce Parlement, Mounir Satouri a déploré que son pays, la France, continue à exporter aux parties au conflit des armes qui sont utilisées en violation du droit humanitaire, notamment par l’Arabie Saoudite.
Le gouvernement français se targue souvent de ne pas voir de preuves à ces accusations. Des enquêtes telles que celles menées par le Groupe d’expert.e.s permettent toutefois d’établir ces liens. C’est aussi le cas grâce à des preuves collectées par des associations comme Amnesty, et aux informations divulguées par les journalistes de Disclose, intimidés pour compromission du secret défense pour avoir simplement exercé leur droit d’informer.
Ainsi nous savons que les systèmes lasers, dont le gouvernement français autorise les exportations, guident les tirs aériens saoudiens, qui bafouent systématiquement le droit humanitaire. Nos industriels assurent également toujours la maintenance des navires saoudiens qui forment un blocus meurtrier, affamant la population et la privant d’accès à l’énergie et aux médicaments.
Ce faisant, l’État français ne respecte ni le Traité sur le Commerce des Armes, ni la position commune de l’Union sur les exportations. Contre les paravents juridiques dressés par la France pour éviter de se faire condamner, seule la Cour Pénale Internationale peut recadrer ces exportations d’armes indignes. Un dossier y a été déposé par les associations.
La formation des clients des ventes d’armes: un trou dans la raquette de la Position commune européenne ?
Les industriels français assurent le service après-vente de ces armes en formant les clients saoudiens à leur usage. La Position commune dont dispose l’UE pour encadrer les ventes d’armes ne contient pas de dispositions à l’égard de ces formations. Un tel ajout serait nécessaire.
Aide humanitaire : où sont les donateurs?
80% de la population yéménite dépend d’aide humanitaire. Alors que cette crise se perpétue du fait de l’inaction de la communauté internationale et des jeux de dupes de certains pays, il est urgent de faire face aux besoins des enfants, femmes, hommes dans la détresse. L’aide proposée par les États donateurs correspond à peine à la moitié des besoins. Pour Mounir Satouri, les États européens et l’Union doivent reconnaître l’urgence de cette aide.
Rapport du Groupe d’expert.e.s éminent.e.s de l’ONU sur le Yemen